Les Népalais préparent leur nouvelle année, qu’ils vont fêter dans une semaine. C’est amusant lorsqu’on vit ici, on perd tous ses repères de temps. Chacun y va de son calendrier. Bien sūr, moi j’ai le mien, qui est différent de celui des tibétains, et les Népalais ont le leur, différent bien sūr de celui des Indiens... Bref, on n’en finit plus de se souhaiter une bonne année. Donc nous nous préparons à faire la fête.

Samedi dernier, une foule dense emplissait les rues marchandes de Katmandu, car là-dessus, tous les peuples se ressemblent : la nouvelle année, ça se fête, avec des achats ! nous étions donc, Nyima et moi, allés errer dans les rues du vieux Katmandu, où régnait une atmosphère de kermesse dans un décors de Moyen Age. Le plus étonnant est de voir le nombre incroyable d’échoppes pleines à craquer de marchandises de toutes sortes : étoffes, soiries, vêtements, chaussures, bijoux, pierres précieuses, mais aussi vaisselle, objets rituels, religieux... sans oublier les épices, le thé, les légumes et les fruits... tout cela débordant largement sur la chaussée. C’est à se demander comment le Népal qui est l’un des pays les plus pauvres du monde, peut ressembler à une caverne d’Ali Baba. J’ai fait ma provision d’épices, aussi odorantes que colorées, et j’ai marchandé une pièce de soie de 6m pour 7 Euros ! Les gens vont et viennent, se préparent à la fête comme si toute leur vie en dépendait. La guérilla maoïste ? on n’en parle pas, du moins dans la rue. Le fait que le Népal ait perdu plus de la moitié de ses ressources touristiques semble n’affecter personne. Pourtant, dans les quartiers normalement voués aux touristes, Thamel, Jyatha, Chetrapathi, là on voit bien la différence : les étalages ont pris la poussière, offrant aux quelques rares Occidentaux leurs objets blanchis par le soleil. Les rues sont quasi désertes, alors que la saison touristique devrait battre son plein.

De retour à Bodnath, nous retrouvons notre univers tibétain, c’est notre Lhassa à nous. A la nuit tombée nous aimons rester sur notre balcon, face au Grand Stupa illuminé. De notre toit, nous pouvons voir les habitations s’allumer une à une. Les gens rentrent très tôt chez eux, Bodnath a la réputation d’être dangereux la nuit. Les autorités n’ont pas besoin d’imposer le couvre-feu, ici dès huit heures et demi, tout le monde est chez soi. Une véritable paranoïa s’est installée, surtout parmi les Tibétains. Ceux qui ont du faire fortune sont les fabricants de rideaux de fer. En effet, tous les immeubles s’en sont dotés, à tous les paliers. Pourtant tout semble calme, on entend le chant des grillons, quelqu’un joue de la guitare... les lumières des monastères brillent doucement dans la nuit...

Nous avons un voisin musical. C’est un riche occidental qui habite une grande maison située juste au pied de notre immeuble, si bien que nous la dominons. Bob, c’est son nom, adore le jazz, et nous en fait profiter presque tous les soirs. Il aime aussi beaucoup la musique sud-américaine... et comme le son monte, nous sommes les premiers bénéficiaires des concerts de Bob. Le seul problème c’est que Bob mets sa musique en marche à l’heure où nous éteignons pour dormir !