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Cétait donc Lha Bab Duchen, jour spécial pour les
bouddhistes et donc tout particulièrement fêté sur les
lieux de pèlerinage tel le Grand Stupa de Baudha.
Déjà la veille, on le badigeonne de chaux pour lui
restituer sa blancheur quelque peu ternie pas la
poussière et les feux de sang dans lesquels il baigne
en permanence. Puis sur le grand dôme du stupa, on
dessine des pétales de lotus. On obtient leffet
escompté en lançant des seaux deau safranée et le
résultat dépend de lhabileté du lanceur. Il faut
avouer que celui qui officie en ce moment nest pas un
grand artiste !
Le jour venu, dès laube, une foule de pélerins se
presse autour du stupa pour la kora.
Mais il faut comprendre comment pratiquent les
tibétains et les usages en vigueur les jours spéciaux.
Dabord, il est très auspicieux de faire de koras en
récitant les mantras, surtout le « mani mantra », mais
il faut aussi faire acte de générosité en pratiquant
les offrandes de toutes sortes. Et bien sur cette
pratique entraîne la création dun commerce fructueux
pour certains.
Cest ainsi quil est dusage de distribuer de
largent à tous les mendiants. Ceux-ci se pressent
donc autour du stupa ces jours-là, et il y a les vrais
et les faux mendiants, pas facile de sy reconnaître.
Comme on distribue des petites coupures, il faut
auparavant changer ses billets. Cest pourquoi on
trouve des « changeurs de monnaie », qui vous prennent
évidemment un commission au passage, et il est
recommandé de recompter plusieurs fois sa liasse, car
les arnaques sont courantes. Ça cest la première
partie de lépreuve. Le plus dur reste à faire : la
distribution. Car les mendiants, plutôt malins, ont
vite fait de repérer le généreux donateur, et toutes
les astuces sont valables pour récolter plus. Ils sont
généralement assis tout autour du stupa, mais il se
déplacent pour vous tromper, il faut donc repérer les
visages pour ne pas tomber dans le piège. Il y a celui
qui change de chapeau pour vous faire croire quil est
différent... Il y a les faux estropiés, couverts de
bandages, et les vrais qui eux, exhibent leurs
moignons.. Celui qui a beaucoup denfants, les envoie
un par un pour quémander, il est ainsi avantagé...
sans oublier que vous pouvez vous retrouver assailli
par une meute dont vous avez bien du mal à vous
défaire. Bref, la concurrence fait rage. On nest
jamais trop de deux avec Nyima pour se livrer à ce
genre dexercice.
Il y a aussi des moines qui pratiquent et demandent
laumône, mais là encore, attention, il y a les vrais
et les faux. Comment les reconnaître ? Pour moi cest
impossible, mais Nyima tend loreille et me renseigne.
Il peut distinguer une vraie pratique dun simple
marmonnement.
On fait aussi beaucoup doffrandes de lumière, donc
les étals de lampes à beurre fleurissent alentours. Le
soir on peut illuminer le Grand Stupa en garnissant
ses différentes terrasses de bougies, on illumine
aussi les terrasses et les balcons des maisons, mais
là, il faut bien reconnaître que le modernisme a sévi
: les guirlandes lumineuses ont remplacé les lampes à
beurre.
Et le soir venu, on a sa récompense, lorsque tous les
monastères silluminent et que résonnent les trompes
et trompettes des moines qui offrent leur musique au
vent de la nuit.
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